HSAV - Chapitre 186 - Il avait dû monter sur le trône de la mauvaise façon.
Le front de Xiao YuAn saignait toujours, ses lèvres étaient pâles ; il ne portait qu’une fine robe intérieure et sa peau était marquée de contusions rouges. Au moindre mouvement, il ressentait une vive douleur. Peu importait la beauté de ses traits, il paraissait à cet instant misérable à l’extrême.
Alors je suis mort ? Et je suis né à nouveau ? Dans le corps de l’ancien Prince Xiao du royaume occidental de Shu ? Combien de temps s’est-il écoulé depuis ma mort ? Et pourquoi se trouve-t-il désormais dans le royaume du Sud de Yan ?
Trop de questions se succédèrent dans son esprit. Xiao YuAn porta ses mains à son front et s’agenouilla sur le sol, submergé. Son corps tremblait, sans qu’il pût déterminer si c’était à cause de la douleur, du froid, ou d’un mélange des deux.
La servante, celle qui avait tenté de lui venir en aide un peu plus tôt, s’approcha timidement et déposa un manteau sur ses épaules : « Prince Xiao Jun, permettez à cette servante de vous raccompagner dans votre chambre. »
Xiao YuAn acquiesça d’un léger signe de tête et se releva avec son aide.
La chambre temporaire de Xiao YuAn se trouvait à l’aile ouest du palais impérial. On l’utilisait d’ordinaire pour recevoir les invités étrangers, et les émissaires y logeaient fréquemment. La servante se hâta vers le Hall médical pour quérir des remèdes destinés à ses ecchymoses et nettoyer la blessure de son front. Pendant ce temps, Xiao YuAn examina la pièce et découvrit un carnet manuscrit appartenant à l’ancien propriétaire de ce corps. Après l’avoir parcouru et interrogé quelques servantes, il comprit enfin ce qui s’était produit.
Trois ans auparavant, le Royaume occidental de Shu s’était retrouvé en pleine crise de succession. L’Empereur, atteint d’une maladie grave, mourut sans désigner d’héritier, et nul ne put s’asseoir sur le trône pendant longtemps. Le Royaume de Shu étant une monarchie matriarcale, les princesses et les princes se disputaient âprement la couronne. La cour devint un véritable nid de vipères, et hormis Xiao PingYang, nul ne semblait capable de stabiliser le pouvoir. Dans ce genre de lutte acharnée, les deux camps finissaient souvent par se détruire mutuellement.
Simultanément, le Royaume de Shu subit catastrophes naturelles, révoltes populaires et invasions barbares. Le pays jadis prospère sombra dans le chaos.
Au fil des ans, le trône du Royaume de Shu passa du statut de petit pain à la vapeur très convoité à celui d’une patate brûlante que personne n’osait tenir.
Ceux qui désiraient autrefois le pouvoir périrent les uns après les autres dans ces luttes sanglantes.
Le Prince Xiao, homme doux et pacifique, aspirait simplement à une vie tranquille et sans heurts. Mais en voyant son pays s’effondrer et son peuple en détresse, il se retrouva incapable d’en supporter davantage.
Avant même que les querelles internes ne trouvent une issue, le danger extérieur survint.
Après l’unification des Trois Royaumes, le Royaume du Sud de Yan commença à convoiter Shu, affaibli et désuni. En cet état, affronter Yan revenait à frapper une pierre avec un œuf (NT : idiome signifiant « tenter l’impossible, s’attaquer à plus fort que soi »).
Pour sauver le Royaume de Shu, Xiao Wangye renonça à son rang et à sa dignité. Il alla jusqu’à s’humilier en offrant sa loyauté, déclarant qu’il serait prêt à verser chaque année un tribut au Royaume du Sud de Yan, pourvu que son pays conserve ses terres et son titre de royaume.
Mais Yan HeQing refusa cette proposition. Son ambition était claire : unifier les royaumes sous un seul pouvoir, sans tolérer aucun État vassal.
Désespéré, Xiao Wangye entreprit un ultime voyage vers le Sud pour se présenter humblement devant le souverain. Même s’il ne pouvait retarder le désastre que d’un jour, c’était déjà un jour de paix de gagné.
Lorsqu’un monarque en vient à un tel point, il ne lui reste plus qu’à inspirer la pitié et la tristesse – à la fois risible et pathétique.
Lorsque Xiao Wangye arriva au Royaume du Sud de Yan pour se proclamer sujet, un an s’était écoulé depuis la tentative d’assassinat. En entendant son nom, Yan HeQing manifesta le désir de le rencontrer, mais lorsqu’ils se virent, son visage demeura glacial.
Xiao Wangye tenta tout pour gagner sa faveur, mais échoua à maintes reprises. Non seulement il ne parvint pas à adoucir le cœur de Yan HeQing, mais il échoua aussi à l’empêcher de lancer ses troupes.
Acculé, Xiao Wangye finit par s’allier secrètement à quelqu’un. Avec son aide, il s’introduisit dans la chambre de Yan HeQing une nuit, résolu à le droguer pour échapper ensuite à sa destinée, ne serait-ce qu’après une seule nuit de plaisir illusoire.
Mais après avoir drogué Yan HeQing, Xiao Wangye se sentit honteux et humilié ; tel une prostituée du pavillon rouge (NT : référence aux courtisanes du célèbre roman classique chinois Le Pavillon Rouge), qui devait compter sur la vente de son corps pour un profit. Les années de répression anéantirent instantanément la dernière ligne de défense du monarque, remplissant son esprit de pensées suicidaires. Impulsivement, il but du poison.
Et alors, le président Xiao s’éveilla.
Xiao YuAn referma les notes manuscrites, secoua la tête et soupira avec une émotion profonde. Puis, il chuchota : « Merci pour ton travail acharné. »
Je ne sais pas qui a aidé Xiao Wangye, puisqu’il n’était mentionné que de manière vague dans ces notes. Mais puisqu’il a pu permettre à Xiao Wangye d’entrer dans la chambre de Yan HeQing en pleine nuit, cela devait être quelqu’un avec une autorité et une crédibilité élevées.
De façon inattendue, un an s’est écoulé depuis ma mort. Une année n’est ni longue ni courte, et je ne sais pas comment Yan HeQing l’a traversée.
Xiao YuAn prit un pinceau, de l’encre et du papier ; tandis qu’il trempait le pinceau dans le liquide noir, il scruta la feuille. Puis, il feuilleta jusqu’à la dernière page du cahier et écrivit en haut : «Vengeance ».
Il rédigea : « Vengeance. Violence domestique, de toutes sortes. Ne me laissez pas l’appeler Yan-ge… attendez, je ne le ferai pas. Je ne l’appellerai plus jamais ainsi ! Plus maintenant ! Bon sang ! La prochaine fois, j’appellerai un chien Yan-ge à la place ! »
Xiao YuAn referma le cahier avec force, mais après un moment, il le rouvrit silencieusement et ajouta le mot « chien aboyant » après la dernière phrase.
Traducteur: Darkia1030
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